Le schah de Perse avait un grand vizir qui était très-juste. Un jour, le vizir se rendait chez le schah ; sur sa route il vit un commencement de révolte. Aussitôt qu’on l’aperçut, on arrêta son cheval, on l’entoura et on le menaça de le tuer s’il ne faisait pas ce qu’on voulait. L’un d’entre eux fut même assez audacieux pour lui tirer la barbe. Quand il fut laissé libre, le vizir se rendit chez le schah, le supplia de venir en aide à son peuple et de ne point punir ses agresseurs. Le lendemain matin, un épicier vint trouver le grand vizir. Celui-ci lui demanda ce qu’il voulait. L’épicier répondit : — Je viens dénoncer celui qui t’a insulté hier ; je le connais, c’est mon voisin, on l’appelle Nagi ; envoie-le chercher et punis-le. Le vizir renvoya l’épicier et fit appeler Nagi. Nagi, comprenant qu’on l’avait dénoncé, arriva plus mort que vif, et se jeta aux pieds du vizir. Le vizir le releva et dit : — Je t’ai non pas envoyé chercher pour te punir, mais pour te prévenir que tu as un mauvais voisin ; il t’a dénoncé ! Méfie-toi et évite-le.